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19 octobre 2015 1 19 /10 /octobre /2015 18:00

 

Une foule dense et nombreuse se presse aux portes du théâtre. Nombreux sont ceux qui arrivent du forum où ils ont passé les heures de l’après-midi à échanger des marchandises et évoquer les actions des grands hommes de la cité. Parmi eux pavane un descendant de vétéran de la légion gallique, qui considère Arausio comme sienne et héritage authentique.

L’heure n’est toutefois plus aux palabres. Elle est aux loisirs. Ainsi va le peuple, entre les arènes et le théâtre, entre les bras combattants et armés et les torses dansants et transformés. La foule est mixte encore, mélangeant en son mouvement continu les toges et les sandales, les parfums les plus fins et les odeurs rances des peaux usées par le soleil et la terre.

Le mythe et le masque
Le mythe et le masque

Il ne vient nullement à l’esprit de ces hommes et de ces femmes, latins ou tricastins, voconces mêmes, de se presser pour s’assurer les meilleures places. Nul ne saurait être à l’écart ou éloigné des siens, ou, pis encore, à un rang qui ne lui convient pas. L’installation n’est certes pas une chorégraphie sans failles, du moins chacun de ces citoyens fait selon l’habitude et s’assied bientôt sur un banc de pierre dominant la scène.

Le mythe et le masque
Le mythe et le masque

 

Le silence se fait dans l’immense hémicycle, gagnant les rangs et les conditions à mesure que le comédien, unique, marche jusqu’au centre du proscenium. Des yeux, des milliers d’yeux, le regardent maintenant, la bouche close, et il voit, lui le réceptacle de tous les personnages du pantomime, se précipiter à ses côtés le musicien qui attend ses premiers gestes. Derrière lui enfin, le décor et les statues, dont celle de l’empereur l’impressionne le plus, qui pointent sur lui seul leurs pupilles de marbre.

Le mythe et le masque
Le mythe et le masque

 

Un son aérien naît, aigu et chancelant, et s’affirme tout à fait en tombant vers des notes plus graves. Le danseur répond à cet appel, mimant le jour qui éclot, ou bien est-ce le monde, et ses pas et ses bras et son torse suivent le rythme de ce son qui percute le fond de la scène et se projette jusqu’aux plus élevés des gradins. Dans l’orchestra, les consuls devinent bientôt Jupiter sous le délicat masque de soie.

Le mythe et le masque
Le mythe et le masque

 

Les gestes sont précis, et rapides. De ses longs doigts graciles, le comédien change de masque, prend celui, plus neutre et donc plus humain, d’un illustre Grec chanté par les récits homériens. Le dos se plie, les muscles se contorsionnent, ce sont les dieux qui écrasent l’homme, suscitant du public un cri. Il est bref, et le silence revient. Les marchands et les artisans, plus hauts dans la cavea, attendent avidement la suite.

Le mythe et le masque
Le mythe et le masque

 

Les notes douces accompagnent cette danse et ce corps qui ne s’arrête plus de tourbillonner. Tout Si loin du drame, les esclaves. Ils aiment voir cet homme qui a trompé les dieux et la mort, précipitant son supplice. Voilà la fin du pantomime : épuisé, le danseur pousse sans relâche une pierre imaginaire qu’un dieu invisible repousse à chaque essai. Les notes s’éteignent. Quelques pleurs retentissent tandis que le corps, sur scène, s’effondre tout à fait.

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